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Le troquet d'en face
15 septembre 2009

Brice ou le faux-procès

Le titre est volontairement provocateur. Je ne vais pas aborder le procès médiatique de Brice Hortefeux après ses propos lors de l'université d'été de l'UMP, mais bien du procès du web en tant que média, cible de toutes les critiques pour détourner le feu des projecteurs du ministre de l'intérieur.

Les faits:
Tout le monde a vu cette vidéo dont voici le lien. Les propos du ministre sont clairement intelligibles, le dérapage se fait en deux temps:
- "il correspond pas au prototype alors" en réponse à une femme qui lui dit que le jeune Amine, manifestement d'origine maghrébine, est catholique, mange du cochon et boit de la bière. Peut-être voulait-il dire "stéréotype" au lieu de "prototype", mais peu importe, le terme est déjà suffisamment réducteur, dans le genre "tous dans le même sac".
- "il en faut toujours un ...", je ne cite pas toute la phrase... Il répond là à cette même femme qui lui dit "C'est notre petit arabe", c'est incontestable.
Après cet épisode, Brice Hortefeux se dit peut-être que finalement, même quand il y en a un, il a des problèmes.
Je le laisse à ses divagations. De toute façon, il ne sera jamais sanctionné, et dans un an, tout le monde aura oublié.

Sauver le soldat Hortefeux:
Il est intéressant par contre d'observer la ligne de défense de l'UMP dans cette affaire. Ils ont au premier abord choisi la stratégie la plus difficile, la négation des faits de racisme malgré l'évidence. Mais il n'y a pas d'autre solution sans se désolidariser du ministre Hortefeux, c'est dire à quel point notre cher président tient à son pote.
La négation se fait sur plusieurs plans:

  • Tout d'abord sur le contexte : "je parlais des auvergnats". Grotesque, mais plus c'est gros, plus ça marche.
  • Le démenti de la cible (Amine) : probablement briefé par le parti, le jeune militant s'est empressé de dire qu'il n'a rien entendu de choquant de la part du ministre, le tout dans un décor "chez moi, en toute spontanéité", bien joué.
  • La caution de ses amis politiques : "je connais bien Brice, il n'a jamais été raciste". Pourtant, en parcourant son CV, on s'aperçoit qu'il n'en est pas à son coup d'essai. Résumé par rue89
  • Enfin la fameuse théorie du complot : "on a voulu le piéger". Oui, c'est le plus facile, mais ça marche à chaque fois, d'autant plus que l'auteur de la vidéo n'est pas identifié, visiblement un journaliste de public sénat.

La contre-attaque:
Mal embarquée donc pour le défendre sur les faits, l'UMP a choisi de pointer du doigt un responsable virtuel:  le web en tant que média. Seul média échappant au contrôle du pouvoir, le web, à travers le phénomène de buzz devient redoutable. La facilité avec laquelle on peut poster une vidéo, en plus de la taille de réseaux sociaux comme facebook ou twitter contribue à répandre une info à travers le monde comme une trainée de poudre, court-circuitant ainsi tous les médias traditionnels dont la rédaction est contrôlée (de façon plus ou moins indépendante). Cette circulation de l'information, du producteur au consommateur, sans filtre, dérange profondément le gouvernement et d'autres bien pensants. PcImpact a résumé un florilège des déclarations dirigée contre le web.
La circulation de fausse rumeur, voir de calomnies, est évidemment tout à fait possible de cette façon, puisqu'il n'y a aucun contrôle. Mais il ne faudrait pas se tromper de cible : un buzz reste un buzz tant qu'il n'est pas relayé par les médias traditionnels, avec toute la connotation péjorative que cela comporte, c'est une sorte de commérage virtuel.
Il existe par ailleurs une loi qui protège les personnes de diffamation et qui est applicable dans les communications électroniques.
Mais l'information a un tout autre impact à partir du moment où elle passe dans un journal télévisé, média de masse par excellence. Et c'est précisément là qu'il doit y avoir un filtre : c'est juste avant de le publier sur lemonde.fr ou de passer sur TF1. La presse a tout intérêt à relayer un buzz, car c'est leur modèle économique qui veut ça (plus l'infos ressemble à ce que les gens veulent entendre, les faces cachées des célébrités en font partie, plus cela rapporte, par la vente de papier ou par la publicité). L'éthique du journalisme (qui n'est pas à remettre en cause dans l'affaire Hortefeux, soyons clairs) doit être garante de la véracité des informations. Le web ne change rien à cela.
Alors plus de contrôle, ça veut dire quoi ? On ne va quand même pas empêcher les gens de se parler et d'écrire ce qu'il veulent, non ?



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